Nous sommes le 1er janvier 1800. Les temps sont incertains. En France, Napoléon a pris le pouvoir. La République helvétique est occupée par l’armée française et les différents courants politiques du pays s’affrontent. D’un côté les « uniates », partisans d’un état centralisé, de l’autre les « fédéralistes » ou réformateurs modérés et en embuscade les adeptes de l’Ancien Régime. Cette période « bancale », parsemée de coups d’état et de revirements spectaculaires durera jusqu’en 1848.

Dans une maison patricienne du quartier du Bourg, une jeune femme est assise à son secrétaire. Un chandelier illumine la pièce et le feu crépite dans la cheminée. La femme tient dans ses mains un petit livre. Après avoir brièvement caressé la reliure en cuir, elle ouvre le livre à la première page, trempe la plume dans l’encrier et écrit les premiers souvenirs de la nouvelle année. Après avoir relu son inscription, elle sèche soigneusement l’encre au moyen d’un papier buvard, ferme le petit livre et le range dans un tiroir du secrétaire. Elle se lève et regarde par la fenêtre les toits du couvent des Cordeliers tout proche. Elle ignore que l’année qui vient de débuter sera la plus dramatique de sa vie.

Grâce à la découverte d’un journal intime ou plutôt d’un diaire manuscrit chez le brocanteur Alain Hunziker, le blog du Bourg vous présentera ces souvenirs des premiers mois de l’année 1800 sous forme de feuilleton hebdomadaire. Feuilleton que nous allons illustrer, dans la mesure du possible, avec des documents d’époque.

La jeune habitante du quartier du Bourg a 25 ans et s’appelle Marie Anne Elisabeth Françoise d’Affry, fille de Louis-Auguste-Philippe d’Affry et de Marie-Anne-Consantine de Diesbach-Steinbrugg. Elle est la troisième d’une fratrie de 5 enfants.

Souvenirs 1800

le 1er janvier – j’ai été me confesser au père Matse aux jesuites, communier et déjeuner chez Nanette, papa (1) m’a donné un louis d’Etrennes.

il arrive deux bataillons incomplets de la 27ème légère on les caserne aux ursulles. (2)

le 2 janvier – mes frères (3) et compagnie sont revenus de payerne

le 3 janvier – j’ai fait de la pâte d’amandes ala reine qui a bien reussi, j’ai partagé avec nanette (4)

le 4 janvier – la foire, le marchand Bettin, sa femme et leur fille agée de 10 ans, meurent de la Vapeur du Charbon (5)

il en arrive chez Mme de Berlens un petit garçon et une petite fille des hermites, dont elle se charge

j’ai acheté du fermier de pré une robe de satin broché (6), pour donner a l’Eglise de pollies petit. elle m’a couté 36

le 5 janvier – le prefet a diné avec nous

(1) Louis d’Affry  http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F5798.php

(2) Couvent des Ursulines. Couvent fermé en 1798 sur ordre des nouvelles autorités. A la suite d’un incendie allumé le 8 mai par des soldats français cantonnés dans la maison, l’édifice dut être restauré. (Les monuments d’art et d’histoire du canton de Fribourg, Marcel Strub)

(3) Charles Philippe d’Affry et son épouse Marie Adélaïde Philippine Dorothée de Diesbach Belleroche dite Mimi ainsi que Guillaume d’Affry. Depuis 1798, Charles d’Affry est « lieutenant de président » et Guillaume « adjoint au comité des logements », deux fonctions en relation avec l’occupant français.

(4) Nanette: Marie de Castella de Berlens, future épouse de Guillaume d’Affry

(5) …Ces infortunés sont obligés, dans les rigueurs de l’hiver, de faire du feu au milieu de leurs chambres ; et le toit n’est pas percé, comme chez les sauvages. Il arrive souvent qu’ils sont surpris, eux et leurs enfants, et suffoqués par la vapeur du charbon. Personne n’est à l’abri de ces accidents imprévus ; car le voisinage d’un pauvre suffit pour tuer un riche. On dirait que l’un se venge de l’autre. Un médecin habile pense qu’en ce cas-là, l’usage trop répandu de l’alkali-volatil-fluor devient dangereux, et que dans cette espèce d’asphyxie il y a un excès de chaleur dans la tête ; que par conséquent il serait funeste d’irriter encore cette partie du corps et d’y déterminer une plus grande quantité de chaleur. (Noyades et asphyxies – D’après Tableau de Paris, par Louis-Sébastien Mercier, paru en 1782)

(6) Brocher (le) Manufacture en soie, or & argent; c’est l’art de nuancer des objets de plusieurs couleurs sur une étoffe, quelle qu’elle soit, ou d’en enrichir le fond de dorure, de clinquant, de chenille, de fil d’argent, de cannetille, etc… (Encyclopédie Diderot-d’Alembert)

Source concernant la famille d’Affry: Louis d’Affry de Georges Andrey et Alain-Jacques Czouz-Tornare, Slatkine 2003

Louis d’Affry

louis d’or

Fribourg vers 1780

Payerne vers 1780

le 6 janvier – Mme du pensier est morte

Guillaume est parti pour berne

le 7 janvier – Desbieux le mari de ma nourrice est venu me voir et m’a amené sa fille à qui j’ai donné un mouchoir

le 8 janvier – on a enterré Mme du pensier aux Cordeliers

on a appris le matin de bonne heure par le Commandant Rifflet les evenemens de la veille à berne la destitution du Directoire (1) Guillaume en est revenu, l’après diné j’ai ecrit a Euphrosine

on a doublé la garde des portes, on arrete a la porte de berne tous les etrangers qu’on conduit au commandant Rifflet.

Le major est parti pour berne.

le 9 janvier – j’ai passé l’apres diné chez Laurette qui est malade.

le 10 janvier – on a passé la revue de la 27ème 1/2 brigade légère, qui est en garnison ici, et de la 5ème auxiliaire, qui est cantonnée dans les environs (4)

Laurette va bien

Marianne de torné a soupé avec nous,  j’ai été voir madelaine. (2)

le 11 janvier – le Major est revenu de berne.

Nanette a soupé ici

j’ai fait de la pâte d’amandes pour julie, minette, mimi et Walpourg.

le 12 janvier – j’ai été chez Mme de Berlens.

Vaillant est revenu de môrat pour commander à fribourg.

un prisonnier français qu’on voulait conduire au quartier general, s’est poignardé à jaquemar. (3)

Mme Philippe buman  est accouchée d’un garçon. Dont Mme buman et Mr Fiwaz père et mère ont été parrain.

j’ai parlé à mes sœurs et à Guillaume.

1) Lors du coup d’État du 7 janvier 1800, le fribourgeois François-Pierre Savary et le soleurois Urs Viktor Oberlin chassent les unitaires Frédéric-César de La Harpe et Louis Secretan du gouvernement central de la République helvétique. Savary (1750-1821), beau-frère de Grégoire Girard,  entrera au Sénat en 1801, sera Syndic de Fribourg (1809-1821) et député au Grand Conseil (1814-1821).

source: Dictionnaire historique de la Suisse

Suite au coup d’Etat du 7 janvier 1800 qui vit le renversement du Directoire exécutif par le Corps législatif, la Municipalité prit rapidement la mesure de l’événement: « Comme des changements aussi majeurs ne peuvent s’opérer sans froissement d’intérêts particuliers il invite à donner à ce décret (de dissolution) la plus grande et la plus prompte publicité, et à requérir le commandant de la garde bourgeoise d’organiser en cas du départ imprévu de la garnison française une force suffisante pour contenir les agitateurs ». Comme l’a écrit Marius Michaud ce coup d’Etat permit « aux républicains réformistes, représentants de la bourgeoisie libérale des villes, de renverser les patriotes ». Le 17 janvier, la Municipalité décréta l’envoi d’une adresse aux Corps législatifs au sujet de la « révolution du 7 janvier ». Le 11 février, la Municipalité recommande au commandant de la place de prendre les mesures nécessaires afin d’empêcher la « conspiration contre la sûreté publique » dont le commandant l’a prévenu.

4) Le pouvoir tenait essentiellement par la présence militaire française, laquelle posait de lourds problèmes d’intendance et grevait les budgets déjà si minces des autorités. Le 14 janvier 1800 trois soldats de la 27e demie brigade furent arrêtés pour le vol perpétré dix jours plus tôt dans la boutique de Nicolas Peter, fabricant de bas sous les arcades.

Alain-Jacques Tornare: Fribourg, il y a deux cents ans (extraits) – Archives de la Ville de Fribourg, protocole de la Municipalité 1800

2) Il s’agit certainement de Madeleine d’Affry (1739-1822), soeur de Louis d’Affry et épouse de François de Diesbach Torny.

3) Le Jaquemard était situé sur le haut de la rue de Lausanne. Cette porte est mentionnée dès 1290 et la tour dès 1411. Elle servait de prison jusqu’en 1848 et fut détruite en 1853 pour des raisons de salubrité, de circulation et d’esthétique.

source: Marcel Strub, Les monuments d’art et d’histoire du canton de Fribourg

Merci à Madame Donatienne Berset, encadreuse, pour le prêt de la magnifique gravure du Jaquemard.

François-Pierre Savary

Le Jaquemard


le 13 janvier – Mme de berlens est venue ici, ainsi que Mr son fils

il y a eu un porteplat (1) chez Mr de Seedorff nous avons été et on y a dansé jusqu’à dix heures

le 14 janvier – le Conseiller Diesbach est venu ici

le 15 janvier – Ninette, Mde boccard, et ma tante fegely ont été ici

le C. Vaillant reprend le commandement de la place.

le 16 janvier – le C. Rifflet est parti pour bade

le C. Vaillant a diné ici avec Mr Herrenschwand le major, ma tante et joseph.

le 17 janvier – Charles Jutz et joseph Reding sont arrivés ici

le 18 janvier – mr gottrau l’avoyer (2) de môrat est fort mal.

le 19 janvier – Walpourg m’a donné une fort jolie bague. L’avoyer est mort.

1) Le « porteplat » était vraisemblablement ce que nous appelons aujourd’hui`hui un repas « canadien »

2) L’avoyer était à la tête d’un état ou d’une ville (bourgmestre ou syndic)

Morat durant la Révolution
La Révolution française inaugura, dans le région de Morat aussi, une ère nouvelle. Après la prise de Fribourg en 1798, Berne voulut faire front à l’armée révolutionnaire française à Morat. Mais quelle ne fut pas la déception des Moratois de voir les troupes bernoises se retirer sans combattre, laissant la ville aux mains de l’assaillant. Par la suite, différentes armées se succédèrent dans la ville et de nombreux bourgeois furent faits prisonniers. Morat perdit ses anciens droits et en 1803, durant la Médiation, elle fut attribuée contre sa volonté – sans doute sur les conseils du landamman Louis d’Affry – à Fribourg. Les décennies de lutte contre le régime patricien et clérical fribourgeois qui s’ensuivirent éveillèrent parmi les Moratois d’opinion radicale des forces nouvelles.

Source: Commune de Morat, histoire

Fribourg en 1800

Les rues n’étaient pas toujours si sûres la nuit. Le 25 janvier 1800, la Municipalité interdit l’usage des « mèches allumées dont se servent plusieurs personnes pour parcourir les rues la nuit » lesquelles  n’atteignent point le but proposé et doivent plutôt être envisagées comme dangereuses ». Elle ordonna par la même occasion que « personne après 9 heures du soir ne doit sortir sans être muni d’une chandelle ou lampe allumée portée de manière à être aperçue, sous peine d’être arrêté et conduit au corps de garde ». Il est vrai que quelques jours auparavant, quelques citoyens probablement en goguette avait menacé en pleine nuit la citoyenne qui habitait le rez de chaussée de l’abbaye des cordonniers de bouter le feu au moyen d’une mèche allumée « à des allumettes qu’elle tient en vente contre les fenêtres ». Une punition exemplaire sera réclamée contre ces trublions immédiatement incarcérés. Les jeunes qui se risquait à commettre des déprédations encouraient des châtiments corporels particulièrement humiliants comme en ce mois de janvier 1800 lorsqu’un dizaine de jeunes gens de cette communes allèrent « détruire et dévaster des haies hors de la porte de Romont dont ils ont ensuite brûlé le bois sur les Grand places ». Le lieutenant de Préfet fut invité « à les faire fouetter à l’hôpital d’après l’usage suivi instamment dans la commune ».

Alain-Jacques Tornare: Fribourg, il y a deux cents ans (extraits)Archives de la Ville de Fribourg, protocole de la Municipalité 1800

Morat vers 1780

Paysans de Morat – Locher

le 20 janvier – j’ai été voir l’avoyère

Mr de Berlens a été ici, pour faire ses adieux.

le 21 janvier – on a enterré l’avoyer

Mr Tavel de payerne a soupé ici

le 22 janvier – il y a eu bal a la maison de ma tante fegely, aux hopitaux derrières (1) – on y a soupé – nous y avons été et nous sommes rentrées a onze heures – Mrs de Villardin et joseph Diesbach, nous y ont conduites minette et moi. Mr de berlens est parti pour Dresde.

le 23 janvier – mr. bonjour a diné ici ainsi que mimi, Charles et mr louis d’epinai – il y a eu un concert aux merciers (2) donné par un passant, – il a été detestable, il n’y avait que des hommes, deux seules femmes y ont été.

le 24 janvier – un bataillon de la 27eme est parti d’ici, pour les paroisses de Marliez, ependes, etc

le 25 janvier – Mlle bonjour, les mlles d’épinai, Belon mimi et nanette ont passées la soirée ici – Laurette est malade

on publie un ordre de la municipalité de ne pas danser les dimanches et jamais après huit heures. (3)

le 26 janvier – il devait y avoir une partie de danse chez mde forestier – on avait grace  au Commandant Vaillant qui l’avait demandée la permission de la municipalité de danser quoique ce fut dimanche (4), mais craignant que cela fit mauvais effet et a cause du Service du pape qu’on annonce dès aujourd’hui par le son de toutes les cloches on a remis la partie au 28.

1) Hôpitaux derrières: c’est l’actuelle rue des Alpes (la route des Alpes construite de 1902-1908 n’existait pas encore)

2) Merciers: Hôtel situé en face de la Cathédrale (voir photo)

3) « Considérant, que les anciennes lois et règlements de police restent en vigueur tant qu’ils ne sont pas abrogés par une nouvelle loi; que les conseils législatifs n’ont rien statué encore sur la police des danses; que les excès, qui ont lieu à ce sujet depuis quelques temps sont contraires au bon ordre, détruisant toute moralité et entrainent une impunité d’abus, que doit réprimer la police: Résolu 1° De mettre en exécution ponctuelle les règlements de 1742, 1772 et 1780 pour autant qu’ils concernent la danse. En conséquence il est défendu de danser les fêtes et Dimanches tant dans les maisons particulières que publiques. Sous quel prétexte que ce soit: il est de même défendu de danser plus tard que huit heures du soir, tant dans les auberges que les maisons particulières. 2° tout aubergiste ou propriétaire qui aura laissé contrevenir dans sa maison aux présents règlements, sera mis en arrestation, et y restera jusqu’à ce qu’il ait acquitté l’amende fixée par la loi, tant pour lui que pour les Danseurs et Musiciens. 3° La présente résolution sera publiée dans toutes les rues, et affiché près de la maison commune. »

Archives de la Ville de Fribourg, protocole de la Municipalité du 25 janvier 1800 (voir copie de l’original)

4) L’encre du règlement a peine séchée, la Municipalité fait déjà une exception pour la « bonne » société.

Une page manuscrite du journal de Elisabeth d’Affry

Hôtel des Merciers, Fribourg

Protocole de la Municipalité de Fribourg du 25 août 1800 (extrait) AVF

le 27 janvier – on a fait a St Nicolas un service solennel pour le papa pie 6. (1) l’évêque a officié, il y a eu un long panégyrique, l’office n’a fini qu’après midi

le soir on a allumé tous les cierges qui etait autour du catafalque, qui etait fort beau.

le 28 janvier – Mr de Marés a donné un très beau et bon gouté soupatoire nous y avons été, on y a dansé jusqu’à minuit a dix heures la garde est arrivée pour faire finir la danse, mais le commandant Vaillant l’a renvoyée, et on a continué, le commandant avait fait venir la musique de la 27ème demi brigade, pendant le soupé, pendant le quel elle a toujours fort bien joué, après elle a joué des Walses que nous avons dansé

un militaire a donné un coup de sabre a ignace Maillardon.

le 29 janvier –

le 30 janvier – il y a eu un bal de la Société des Dmlles Buman.

nous avons été faire une visite chez Mme forestier.

le 31 janvier – trois compagnies de la garnison sont parties pour lausanne

le Bon (bataillon) de la 27ème qui était allé dans les paroisses de Marliez et c. revient en ville.

on met a jaquemar deux filles de la roche, qui avaient suivi des soldats.

le 1er février – le Bataillon qui est venu hier, repart pour aller du coté d’avenche

on enterre l’administrateur Kolly mort d’une fievre epidemique

le 2 février – on arrange une partie pour Berne

1) Le pape Pie VI que l’on appelait il Papa bello est fait prisonnier en juin 1798. Incarcéré par la République française à Valence (F), il meurt le 29 août 1799 à l’age de 82 ans. Au moment de sa mort, une commémoration n’est tout simplement pas envisageable. Le coup d’État du 7 janvier 1800 rend cette cérémonie possible.

Pie VI (Pompeo Batoni)

Soldat français 1789

le 3 février – après avoir dejeune chez Mdme de Berlens, nous sommes partis pour Berne a neuf heures, papa, Mr et Mde fegeli, joson, albert, ninette, Belon, Consatantin, Mr de Villardin, minette, guillaume et moi

arrives a Singine (1) on a mangé un morceau vers les midi, à trois heures arrivés a Berne nous avons descendu au faucon, diné a la table d’hôte

après le diné nous nous sommes promenés a la platte forme (2), de la chez les Kirchberg (3) et chez Mr Savary, nous avons pris le thé chez les Kirchberg – nous sommes ensuite revenus au faucon ou nous avons soupé a table d’hôte, il y avait beaucoup de monde, entre autres le C. quatremere, adjudant general du general moreau (4), qui nous a longtemps conté des merveilles des araignées, et nous a fort amusé. minette, ninette, Belon et moi avons logés ensemble – minette et moi avons fait peur a nos compagnes, qui tremblaient d’inquietudes des assassins et c.

le 4 février – nous avons dejeuné chez Mr Savary, dela nous avons été voir Sophie qui est venue avec nous tous, et Mde Savary mlle marie girard et Colin Savary, voir le grand Conseil et le Senat, ensuite promener a la platte forme, et de la diner tous ensemble et mr Savary et mr girard cordelier (5) au faucon en chambre particuliere. après diné nous avons été voir l’hotel de Musique, celui de la monnaye, la maison des orphelins, la halle au Blés (Kornhaus) et c.  – passer la soirée chez les Kirchberrg ensuite revenir souper a table d’hôte au faucon, il y avait du monde et toujours Mr quatremere, que nous avons ecouté fort tard

le 5 février – nous avons eu la visite de Mr Savary de bonne heure – Belon et Walpourg l’ont consulté – après dejeuné nous avons été chez Mdme Savary et chez les Kirchberg – nous avons dela été dans les boutiques, Sophie et marianne sont revenues à l’auberge avec nous, nous en sommes parties à midi, arrivés à trois heures a la Singine nous y avons diné, et nous avons été de retour à fribourg a sept heures.

le 6 février – on a arreté jobart et un homme qui avait échappé a ses conducteurs qui l’amenait les poings liés, de morât a fribourg

il arrive du valais des troupes fribourgeoises au nombre de deux cent.

le 7 février – les fribourgeois qu’on voulait renvoyer chez eux sans être payés, refusent de partir si on ne leur paye au moins une partie de ce qu’on leur doit, on finit par leur payer six francs, et les desarmer, ensuite ils sont partis.

le 8 février – j’ai acheté d’un passant 7 Schalhes à 6 pièce.

on a enterré mr buman de bertignie.

le 9 février – on a organisé une compagnie de grenadiers de la garde Nationale, mes frères en sont

le petit hubert Boccard est tombé et s’est mordu la langue en tombant, il en a partagé une partie, et il ne pouvait ni manger ni parler.

1) Passage sur la Singine à Neuenegg (Neuenek, voir l’extrait de la « Nouvelle Carte Hydrographique et Routière de la Suisse, Levée et executée par J. H. Weiss, Ingenieur Geographe à l’Etat Major Général de l’Armée du Rhin »)

2) La plateforme à côté de la Cathédrale qui surplombe l’Aar avec une vue sur les Alpes bernoises (voir le plan de Berne ci-après)

3) Il s’agit certainement des « Kirchberger », famille aristocratique de Berne.

4) Jean Victor Marie Moreau (1763 – 1813), général français de la Révolution. En 1800 il commande l’armée du Rhin.

5) En 1800 le Père Grégoire Girard (1765 – 1850) est curé de Berne. C’était la première fois depuis la réformation, qu’un prêtre catholique était officiellement installé dans cette place. (Ernest Naville, Notice biographique sur le père Girard de Fribourg, 1850).

Carte routière de 1800 (extrait)

Berne en 1835

Plan de la ville de Berne en 1800

Grégoire Girard

le 10 février – j’ai été me promener au tirage (1) avec papa et minette.

le 11 février – Locher (3) a commencé ici, le portrait de Walpourg.(2)

le petit Boccard est bien son accident n’aura pas de suites.

on fait un encan (4) des meubles de Mr Vonderweidt.

le 12 février – il y a eu a belfaux une partie de traineaux de Mesdames D’épinai, Seedorff et Schaller.

le 13 février – j’ai été voir madame Carlo.

le 14 février – j’ai été chez Mlles Schaller et chez Mde Maillard

Diné chez les cordeliers ou etait le Commandant.

le 15 février – j’ai ecrit pour ma tante Diesbach, j’ai été chez Mde forestier

le 16 février – j’ai ecrit a Sophie et a Montansier

1) Le tirage est le stand de tir aux Grands-Places

2) Marie Valpurg de Maillardoz, baptisée à Fribourg le 18 août 1778. Elle épouse le 20 octobre 1799 à Fribourg François Nicolas Joseph Bruno Fégely, dit Joson, (13.10.1760 – 19.09.1841). Ils habitent la maison Fégely à la Place Notre-Dame (la maison des trois cheminées).  Source: http://www.diesbach.com

3) Emmanuel Locher, fils de Gottfried, né à Fribourg vers l’année 1765, a hérité d’une partie du talent de son père et a peint, comme lui, des portraits, surtout en miniature, d’une vérité frappante et d’un coloris bien entendu, ainsi que des tableaux d’autel, parmi lesquels nous citerons le St-Charles de l’église des RR. PP. Cordeliers, peint en 1811.

Cependant Emmanuel Locher s’est particulièrement distingué par ses paysages, ses scènes champêtres et ses costumes suisses dont il gravait les contours et qu’il peignait ensuite à l’aquarelle: qui ne connaît, par exemple, ses Trois Grâces de Guggisberg?** Fixé à Bâle dès l’année 1813, cet artiste doit y être mort peu d’années après.

Voilà tout ce que nous avons pu apprendre de plus ou moins positif sur la carrière d’Emmanuel Locher. Nous sommes encore moins renseigné à l’égard de son frère François. Nous lisons seulement dans le protocole de la confrérie de St-Luc, séance du 18 septembre 1796: »Les frères François et Emmanuel Locher, fils de Gottfried, viennent reconnaître le droit de leur père et sont reçus confrères pour 15 batz et un pot de vin. »

Au dire de M. Kessler, un Locher, peintre qui peignait dans tous les genres et avait presque toujours vécu à Bâle, serait mort à l’hôpital de Fribourg vers 1830…

Nouvelles Étrennes Fribourgeoises 1878 (pages 40/41)

** ou « La belle batelière de Brienz ». Un autre « tube » de l’époque. L’attribution d’une œuvre à l’un ou l’autre Locher (Gottfried le père ou Emmanuel et François les fils) n’est pas certaine. En principe elles sont signée « Locher ».

4) Vente publique à l’enchère

La maison Fégely, Place Notre-Dame

La maison Fégely, Place Notre-Dame

Emmanuel Locher – Les Trois Grâces de Guggisberg

Emmanuel Locher – La belle batelière de Brienz

le 17 février – revue des grenadiers

le 18 février – le commandant et Mr Savary ont passés l’après soupé ici.

le 19 février – on a fait un porteplat chez Mde forstier, nous avons dansé jusqu’à huit heures on a soupé, et on a recommencé a danser après, la garde est arrivée, le commandant qui était avec nous l’a renvoyé, on a continué a danser nous sommes partis à 11 heures et les autres à minuit

le Chanoine Uffleguer jouait du violon (1)

le 20 février – on a fini le portrait de Walpourg

le 21 février – Mr Savary a passé l’après soupé ici

le 22 février – on a fait payer a Mde forestier l’amende, pour avoir laissé danser chez elle passé huit heures.

j’ai été chez ma tante Fegely, mon oncle Steinbrugg, Nicolas Fegely et Mr de Seedorff ont dinés ici

le 23 février – la 46ème 1/2 brigade est arrivée ici, allant de berne à vevei, on ne l’avait pas annoncée (3)

nous avons fait le menu du reveillon (2)

le 24 février – la 46ème est partie (3)

grand embarras pour trouver une salle de danse, finalement on accepte celle que Mlle de bionnens avait proposée et charles va remercier en refusant celle de Mr Wild

il y a un porteplat chez Mde de berlens, après diné, constantin est venu nous chercher avec Walpourg et ninette et nous avons été passer la soirée et souper avec ceux qui avait fait le porteplat, nous avons été fort gay.

le 25 février – la 46ème est revenue (3)

on a dansé dans tous les quartiers de la ville, notre Société a dansé chez Mlle Bionnens avec musique de berne, nous avons dansé depuis 4 jusqu’à neuf heures, de la nous avons été chez mimi ou était notre reveillon en porteplat, nous avons veillé seulement jusqu’à onze heures.

on a jugé jobart, et condamné à deux ans de détention.

le 26 février – Mr tavel a diné ici, la 46ème est repartie pour berne. (3)

nous avons été aux cendres à St Nicolas. (4)

1) Pierre-Balthasar Uffleger de Fribourg est nommé chanoine en 1791 et déposé en 1792.

« L’abbé Pierre Balthasar Uffleger, ci-devant chanoine de St. Nicolas, puis de Notre-Dame, à Fribourg étant pour sa mauvaise conduite sous curatelle depuis 1792, mais errant continuellement hors de son domicile depuis plusieurs années; la municipalité de Fribourg, par arrêté du 18 décembre 1802, a jugé qu’il étoit nécessaire de faire connoître son interdiction par la voie des gazettes, afin de prévenir dans l’étranger les contrats illégaux qu’il pourroit faire. »

Journal Helvétique, Mardi 4 Janvier 1803

2) Il s’agit du réveillon de Carnaval

3) « Cessez ce va-et-vient ridicule! » De tout temps, les stratèges militaires sont d’une efficacité redoutable.

4) Le mercredi des Cendres marque la fin du Carnaval et l’entrée en Carême. Durant la cérémonie, des cendres sont déposées sur le front des fidèles.

Maison d’Affry Fribourg – détail de décor du salon

Fribourg vers 1820

le 27 février – je suis très enrhumée

Cecile preux est arrivée chez la Marquise

le 28 février – j’ai reçu un paquet de18 Schalhs.

le 1er mars – on a volé dans la nuit à Gönniges de morat la valeur de 100 louis, en montres

le 2 mars – on a débité une loterie pour Mde Dorsai, j’ai pris deux billets

le 3 mars – Mr jaquier qui était à cheval avec plusieurs jeunes gens, est tombé et s’est fait assez de mal.

j’ai passé la matinée avec mimi et josephine Larté.

le 4 mars – on a amené ici des effets volés, saisis à Cheter (1)

papa est très enrhumé

le 5 mars – on a amené des voleurs en ville, pris à môrat

papa est mieux

le 6 mars – le rhume de papa augmente

on a amené des voleurs pris à cheter, j’ai diné chez Mde Boccard

le général Chabert (2) est arrivé pour passer en revue la garnison d’ici. il loge chez Mr de Villardin, et sur la demande du commanant mes parens le reçoivent à la soirée ici ou il est venu avec sa femme le comm de la place Vaillant, le C Desay chef de la 27ème légère et le C Derbés chef de bataillon de la même demi brigade

après leur sortie belon et constantin on soupé ici

la femme du gal Chabert est fort jolie

le 7 mars – le gal Chabert est reparti pour iverdon ou est son quartier général

le rhume de papa est plus fort

le 8 mars – j’ai été chez nanette qui était malade avec mimi

papa est toujours bien enrhumé

le 9 mars – papa a consulté le prefet, je l’ai consulté aussi pour me guerir les gencives qui saignent toujours surtout la nuit, il m’a indiqué de prendre une médecine et de me rincer au moins deux fois par jour la bouche avec de l’eau dans laquelle j’aurai mis de l’Esprit de cochlearia (3)

j’ai été chercher ma tante Diesbach après diné, elle a fait un lotto avec nous. mimi a diné ici

1) Il s’agit de Chiètres/Kerzers

2) Le général Théodore Chabert: http://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9odore_Chabert

Malheureusement nous n’avons pas trouvé le portrait de Madame Chabert qui est fort jolie

3) « Le suc & l’esprit de cochléaria, mais sur-tout le dernier, sont fort usités extérieurement dans le traitement des ulceres scorbutiques, dans les gonflemens sanguinolens des gencives, dans leur inflammation, leur exulcération, lorsque les dents tremblent, &c. On lave aussi les taches de scorbut avec le suc ou avec l’esprit de cette plante : on peut appliquer dessus la plante pilée avec un égal succès. »

Encyclopédie de Diderot et d’Alembert

Le général Théodore Chabert

Colcheria officinalis – Cranson officinal

le 10 mars – papa a pris une médecine, on a entendu le canon tout le jour, on croit que c’est à neuchatel pour le serment de fidélité que les habitants ont porté au roi. (1)

on annonce à 9h du soir par une proclamation qu’il arrivera un escadron d’hussards (2) pendant la nuit et il n’est venu personne

le 11 mars – le prefet est venu voir papa qui n’est pas mieux.

mimi a diné ici elle y a soupé aussi avec Charles

on fait une réquisition de 59 chars à trois chevaux pris sur les 3 districts de Fribourg, Schmitten et la Roche, jevisy (3) en fourni deux que la commune loue à des voituriers en ville, et qui coutent 7 ecus neufs par jour, ils sont destinés dit on, a aller chercher des avoines à pontarlier et les amener de suite à l’armée.

l’escadron d’hussards est arrivé à 2h. après midi, il est du 5ème et ils ont le doleman blanc (4)

le 12 mars – papa a pris une médécine dans laquelle est un grain d’emetique. (5)

on attend tout le jour les chars de requisition, ils arrivent en partie, on envoye des hussards dans les communes qui n’ont pas encore obéi a la ditte requisition

le 13 mars – tous les chars déjà arrivés partent pour pontarlier chercher de l’avoine, ils emportent avec eux du foin pour quinze jours, les derniers chars arrivent

on a jugé et absout jobart au tribunal du canton, il est remis en liberté

on fait l’anniversaire du petit verro

papa est mieux le prefet est venu le voir

guillaume est parti pour Cugé (6) avec louis, colin de Seedorf, ignace buman et colin de fuyens

le 14 mars – les hussards blancs partent

papa est bien

le 15 mars – j’ai acheté une perruque blonde

le 16 mars – j’ai été à la poya.

nous avons été à la promenade ou il y avait beaucoup de monde

1) A cette époque Neuchâtel est une principauté et a comme suzerain le roi de Prusse Frédéric-Guillaume III

2) Hussard (du hongrois husz; pr houss, vingt, et ar, prix, solde.

Soldat des corps de cavalerie légère dont l’uniforme ressemble à celui de la cavalerie hongroise. Ils furent établis en France sous Louis XIV. L’habillement de cette troupe est élégant et lèger; leurs chevaux sont de petite taille; leurs armes consistent en un sabre, une carabine et une paire de pistolets. Le shako, la sabretache, le dolman d’un hussard.

Dictionnaire National 1855

3) Givisiez où la famille d’Affry possède un château

4) Sorte de veste que portent les hussards, lorsqu’ils sont en grand costume, et qu’ils placent sur l’épaule gauche. Les Hongrois qui avaient emprunté cet habillement des Turcs, l’importèrent en France lorsqu’ils vinrent servir Louis XIV.

Dictionnaire National 1855

5) Le tartrate de potasse et d’antimoine, qui a la vertu vomitive.

6) Cugy, baillage de Fribourg, la famille Reyff y possédait deux châteaux qui existent encore. (Source: commune de Cugy)

Neuchâtel vers 1820

Neuchâtel vers 1820

Carte routière1800

Carte routière 1800

Hussard 1800

Hussard 1800

Cugy, église et château

Cugy, église et château

le 17 mars – j’ai été voir Madelaine à Nierlet avec romain, mimi et jacinthe de reinold.

la garnison qui était un bataillon de la 27. légère est partie, c’est la garde bourgeoise qui recommence a monter la garde

il arrive un bataillon de la 27ème on la loge chez le bourgeois

le 18 mars – le bat. de  la 27ème fait séjour et il est payé de 3 decades

le 19 mars – le bat. de la 27ème est parti

le 20 mars

le 21 mars – j’ai reçu réponse de felicité limat qui ne peut venir

Ma tante m’a donné a distribuer des billets de loterie d’une paire de serin pour son domestique Charrière

le 22 mars – j’ai fait venir marianne guyot pour lui demander si elle veut servir, elle y consent et demandera avis à sa sœur.

le 23 mars – marianne me rapporte le consentement de sa sœur, je lui dis de venir un autre jour pour l’arrangement du gage

nous avons été à montorge avec belon, Walpourg, nanette fegeli, minette, constantin, joson fegeli et mr gasser

j’ai été chez Mde Maillardon, nous avons été à un thé chez mimi

Création d’une Garde bourgeoise

La commune devait ainsi faire face à des problèmes d’insécurité. Le 26 juin, « la Municipalité sentant le besoin d’organiser au plus tôt la Garde bourgeoise nomme le citoyen Lanther, ci-devant avoyer d’Estavayer, commandant et l’invite à présenter trois sujets pour la nomination de l’adjudant-major, et à s’occuper de suite de l’organisation de quelques compagnies, qui puissent être employées au besoin ». Seront nommés au grade d’adjudant-major Claude Sudan, Vil[l]ard l’aîné et Hyacinthe Techtermann. Chaque maison devait fournir un garde, hormis celles habitées uniquement par des femmes. Mais nombreux furent ceux qui tentèrent d’échapper à cette astreinte qui frappait surtout les personnes qui n’avaient pas les moyens financiers pour se faire remplacer. Chaque fois qu’un homme commandé pour la garde ne se présentait pas, il se voyait contraint de verser « six piécettes » à son remplaçant, sous peine d’être mis en arrestation. Tous les citoyens de 16 à 35 ans, astreints au service dans la Garde, ne le firent pas de bon cœur et il arriva au commandant de la place de se plaindre de « la nonchalance avec laquelle se fait le service de la Garde bourgeoise ». De même, la Municipalité voulut forcer les membres du Tribunal cantonal à servir. Ces derniers protestèrent auprès du Préfet national et en dernier ressort le Ministre de l’intérieur demanda « à la Municipalité de se désister de sa résolution au sujet du tribunal, dont il a trouvé les réclamations fondées et les fonctions peu compatibles avec le service militaire ». Le 16 juillet, le citoyen Gendre, apothicaire, fut exempté de service au motif « que sa maison à la Motta est trop écartée pour jouir de la protection et de la sûreté que procure la garde, que par conséquent le seul homme qui l’habite ne peut monter la garde, étant obligé de rester chez lui pour se garder lui-même ».

Alain-Jacques Tornare: Fribourg, il y a deux cents ans (extrait) – Archives de la Ville de Fribourg, protocole de la Municipalité 1800

Couvent de Montorge

le 24 mars – mr de reinold gringalai est assez mal d’une fièvre

le 25 mars – mr landerset (1) a commencé mon portrait

j’ai engagé marianne je lui ai donné 6 livres d’arrhes (2) et promis 4 louis et demi de gage

le 26 mars – j’ai été 2 heures le matin et 2 heures l’après midi chez mr landerset qui a  fort avancé mon portrait.

mr de reinold est mort, madelaine est arrivée top tard il était déjà mort

le 27 mars – j’ai été le matin chez mr landerset

j’ai été voir madelaine

j’ai été promener après diné au tirage avec mde maillard et ma tante la vicomtesse

minette est allé avec belon et mr de villardin diner à valleried.

le 28 mars

le 29 mars

le 30 mars – la ferme de Seedorff a brulé

on a baptisé la fille de mde carla de pensier

1) Joseph Landerset, né vers le milieu du siècle dernier, est issu d’une famille patricienne de Fribourg distinguée par les emplois que plusieurs de ses membres ont remplis tant dans la magistrature qu’au service militaire. Lui-même a été colonel au service de la France.

Joseph Landerset avait montré dès sa plus tendre jeunesse un goût décidé pour la peinture ; il ne cessa jusqu’à sa mort de consacrer tous ses loisirs à cet art et devint un des peintres amateurs les plus agréables de son temps. Il peignait dans tous les genres ; il a fait quelques portraits d’une ressemblance frappante et d’un coloris précieux, entre autres celui du Landammann d’Affry ; il s’est même essayé, dit-on, avec quelque succès dans les tableaux d’histoire : mais son genre de prédilection paraît avoir été le paysage à l’huile et à la gouache. Il en a copié un nombre assez considérable de Vernet, de Berghem et d’autres maîtres, qui décorent aujourd’hui les salons de Fribourg, sa ville natale, et spécialement ceux de quelques-uns de ses descendants.

M. Landerset est mort le 4 février 1824.

 L.G. Etrennes fribourgeoises

Joseph Landerset est né le 9 février 1753 à Fribourg. En 1787 il épouse Thérèse Gérard originaire de Givet (Ardennes), fille du Général Gérard.

Source: http://www.diesbach.com/sghcf/l/landerset.html

2) Avance sur gage

Joseph Landerset, le Petit-Paradis

Joseph Landerset, Paysage, gouache

le 1er avril – Walpourg est partie pour pré (1)

le 2 avril – l’arrivée et le départ des courriers changent de jour, on suivra dorénavant les jours pairs et impairs d’après les decades

le 3 avril, il est arrivé un bataillon de la 44ème il est logé chez le bourgeois

j’ai été voir madelaine qui est malade

le 4 avril – Walpourg est revenue

le bataillon est parti pour Valais

le 5 avril – j’ai été en confesse au père Matse

nous avons été à granfay après le miserere (2)

le 6 avril – j’ai retourné à confesse au père Matse et j’ai fait mes paques à St Nicolas

le 7 avril – j’ai retourné chez mr landerset le matin

l’après midi nous avons été voir pecher aux étangs (3), il y avait beaucoup de monde, nous avons été jusqu’à la Chassote avec papa et nous sommes revenus aux étangs jusqu’à l’heure du lotto

1) Prez-vers-Noréaz où la famille Fegely possède le château construit en 1770

2) Psaume de pénitence que l’on récite ou que l’on chante à l’office durant la Semaine sainte (le 5 avril 1800 était le Samedi saint)

3) La porte des Etangs qui se trouvait sur le haut de l’actuelle rue de l’Hôpital

La Porte des Etangs

le 8 avril – nous avons été après midi sur la tour de St Nicolas, le temps était fort clair et la vue fort belle.

nous avons encore été aux etangs voir la pêche qui dure trois jours c’est le Commandant qui l’a faite faire pour donner le poisson aux couvens (1)

Mde rämi est accouchée d’une fille

le 9 avril

le 10 avril – j’ai retourné le matin pour la dernière fois chez Mr Landerset

le 11 avril

le 12 avril

le 13 avril – Larmintran est venu le matin avec Mr de Villardin

le 14 avril

Remarque: Une semaine plutôt calme. Patience, cela ne va pas durer.

1) Le 31 mars 1800, le commandant de place qui voulait “régaler les capucins de poisson” obtint de pêcher dans l’étang “en considération des égards qu’il a eu jusqu’ici pour la commune”.

Archives de la Ville de Fribourg, protocole de la Municipalité 1799-1800 fol.157

Fribourg en avril 1800

Que se passe-t-il dans la vie de tous les jours à Fribourg en ce printemps 1800. Le 7, “le chantre représente qu’il ne peut plus suffire aux dépenses qu’exige l’entretien des enfants de choeur, s’il ne reçoit pas au moins à compte de ce qui lui est dû à ce sujet”. Le 21 avril, la Municipalité demande à la Chambre administrative de lui “donner 40 à 50 sacs de grain soit à compte de ce qui nous est dû pour fournitures, soit comme prêt, afin que la Municipalité puisse faire face à ses besoins tant pour le paiement de ses pensionnés que pour les pauvres. La Municipalité décide alors de faire un geste et s’adresse au gouvernement pour obtenir du grain. Le même jour elle ordonne au Bumeister “de faire réparer le canal public de la rue de Lausanne qui est endommagé près du Cheval blanc”. Le 21 avril 1800, une citoyenne “divorcée d’avec son mari d’après jugement de l’évêque” obtient “de pouvoir jouir d’une partie de meubles pour elle et ses enfants” ainsi que de “deux cochons, vu que son mari a déjà disposé de deux cochons”. Quant au ramoneur Mathey, ordre lui fut donner “de ramoner aussitôt la cheminée dans la Maison du citoyen Bovard sur la Planche, et ce sans en être payé. Vu qu’il l’a récemment ramonée on ne peut plus mal”.

Le 21 avril 1800, la Municipalité prend connaissance d’une lettre adressée par la Chambre administrative à la chambre de régie dans laquelle le gouvernement cantonal estime “que la Commune de Fribourg doit rester dans ses anciennes limites qui s’étendent jusqu’aux bornes connues sous le nom de Burgerziehl, tandis que la Municipalité se montre résolu “de les étendre si possible jusqu’aux Bürgurziel”.

Le 23 avril, Jean-Baptiste Farvagnié obtient la “concession du fond des maisons écroulées à la Grand-Fontaine pour en faire un jardin”, à condition “que la Municipalité pourra retirer à elle ce terrain lorsqu’il le jugera avantageux au public” et que “ce citoyen établira et entretiendra un mur assez fort pour empêcher l’écroulement de la rue”. De plus, “il ne pourra aplanir ce terrain, mais devra le laisser en pente, dont la partie la plus élevée sera celle qui est du côté de la rue”. Le 29 avril 1800 “le propriétaire des Bains de la Badstube au nom de quelques autres citoyens demande que l’on ouvre de nouveau le grand escalier qui a été fermé à cause des troupes qui étaient casernées, quel motif n’existe plus”. La Municipalité refusa arguant du fait que des troupes pouvaient toujours revenir et que surtout “cet escalier n’est pas praticable et que la Municipalité n’a pas les moyens d’y faire les réparations nécessaires”. Le 27 juin 1800, plusieurs particuliers des Places et de la Neuveville obtinrent de rétablir à leurs frais le passage des grands escaliers à condition de le fermer lorsqu’il y aura de la troupe dans la caserne et d’établir une porte au bas qui, “ainsi que la supérieure sera tous les jours fermés à la nuit tombante et ouverte au jour venant”.

Alain-Jacques Tornare: Fribourg, il y a deux cents ans (extrait) – Archives de la Ville de Fribourg, protocole de la Municipalité 1800

Joseph Landerset

Joseph Landerset, Courgevaux 1808

le 15 avril – Larmintran est venu faire signer mon contrat de mariage, papa maman et tante Diesbach y etait ainsi que les deux temoins qui sont joseph de Diesbach et constantin.

Mr Savary et madame, Charles mimi et Mr Larmintran ont dinés ici, ainsi que mes tantes Diesbach et Vicomtesse

le 16 avril

le 17 avril

le 18 avril – j’ai fait une confession generale depuis la derniere que j’ai faite il y a cinq ans. C’est au pere Matse que je me suis confessée

le 19 avril – mon portrait etant fini je l’ai donné a mes parens, et un rouet a maman

le 20 avril – j’ai été confesser au pere Matse et communier au College, de la a une messe aux Cordeliers, ensuite je suis revenue a la maison ou j’ai eu du monde toute la journée laurette, marianne de fuyens, nanette, fanchette, Walpourg et belon y ont passée une partie de la journée pendant laquelle mr de Villardin etait allé a domdidier, le soir je me suis promenée avec minette, Walpourg et son mari sur la place notre Dame, on a fait le lotto ordinaire avant et apres soupé, j’y ai joué avant mais pas apres

mr de Villardin en revenant est venu souper a la maison et il est reparti tout de suite apres

tard quand tout le monde a été parti j’ai été demander a papa et a maman chacun en particulier, pardon, et leur benediction ce qu’ils ont fait avec une grande bonté

le 21 avril – j’ai été a six heures confesser au pere Collaud Cordelier, en revenant a six heures et demie mr de berlens qui etait arrivé a minuit de paris, est venu apporter a la maison tous les bijoux qu’il avait achetés pour nous, mr de Villardin qui etait la me les a remis, il y avait pour moi un collier en or et perles qui entourent des pierres bleues peintes en or et des pendans d’oreilles assortis, une chaine en anneaux de cheveux attachés avec de l’or, un bracelet et une bague de même, j’avais envoyés les cheveux ceux du bracelet sont de mr de Villardin, ceux du collier de belon et de Walpourg et ceux de la bague d’antoinette Montansier (1), une chaine en noir et or que j’ai donnée a minette, une avanturine a julie et une noir bleu et or a ninette, une paire de pendans d’oreilles noir et or que j’ai donné a nanette, une … d’écaille blonde a Walpourg, et une bague en or et en perle a belon

les dames susdites ont eue la complaisance de venir me voir jusqu’au moment de mon depart, qui fut a sept heures et demie, je partis en voiture avec maman md boccard et mon oncle laurent fegely apres venait dans d’autres voitures, mes soeurs et mimi, mes tantes Diesbach, Vicomtesse et fegely et ninette mde de berlens vint aussi ainsi que mr son fils, le conseiller de Cherpe, consantin, joseph, mon oncle de Diesbach, colin fegely, philippe fegely

on nous a arrétés a la porte des etangs pour nous donner a boire et des bonbons, arrivés tous a jevisy (2) nous nous sommes reposés un moment et de la nous avons été a l’église ou le curé (3) nous fit un assez long discours et apres nous avoir mariés, il dit une messe que nous entendimes tous ensemble, c’est Charles qui m’a mené a l’autel, et mr de berlens qui m’a ramené a ma place et a la maison, en etant de retour nous avons dejeuné, j’ai donné la a mes oncles tantes et temoins les petits cadeaux qui leur etoient destinés, mr de Villardin a donné a papa une pipe ainsi qu’a Charles, et une tabatiere a guillaume, en arrivant de l’église je me suis mise a genoux avec mr de Villardin devant papa, maman, et mdme de berlens pour leur demander leur benediction

pendant le dejeuné mimi s’est trouvée assez incomodée, elle avait mal aux nerfs

apres dejeuné on s’est promené dans le verger et dans le jardin pendant ce tems apres avoir encore embrassé papa je suis partie sans faire d’autres adieux qu’a mes soeurs, ceux la m’ont déjà tant couté, mr de berlens, Constantin et Charles m’ont mené a la voiture et guillaume y est venu avec mr de Villardin et moi, nous avons été diner a môrat et de la a berne ou nous avons trouvé mr Savary qui venait a notre rencontre avec sa femme, ils nous ont invité a diner pour le lendemain, nous n’avons accepté que le déjeuner, voulant partir de bonne heure.

1) L’utilisation de cheveux humains dans la bijouterie est attestée dès la Renaissance et fréquente au 18ème et 19ème siècle. A noter que cette technique est à nouveau utilisée dans la bijouterie contemporaine.

La plupart des bijoux en cheveux, bracelets colliers et bagues étaient fabriqués a partir de tresses réalisées sur un métier à fuseaux. Ces tresses une fois terminées étaient rigidifiée en les trempant longtemps dans de l‘eau bouillante. Les bijoutiers les montaient sur un support en or pour mieux résister à l épreuve du temps. Il fallait trouver un bijoutier de confiance pour être sur qu’il ne mélange pas les cheveux de la personne chérie avec ceux d’une autre.

A noter également que les matières premières comme par exemple l’or étaient rares à cette époque à cause de la situation politique.

Sources: Joëlle Inglin, bijoutière et Jean-Jacques Richard http://richardjeanjacques.blogspot.com/

2) Givisiez où la famille d’Affry possède un château.

Avec ses trois châteaux (d’Affry, de Boccard et Von der Weid) on appelait Givisiez « Le Trianon fribourgeois » ou « Le petit Versailles ».

3) François-Joseph Audergon, curé de Givisiez de 1762-1802

Eglise des Cordeliers, confessionnal

Exemple de bijou en cheveux

Eglise de Givisiez

le 22 avril – mr lanther est venu nous chercher pour aller déjeuner chez mr Savary ou nous avons trouvé mr larmintran, apres nous avons été voir les Kirchberg.

a midi nous sommes partis, nous avons dinés a fraubrunn, et de la nous avons été a Soleure ou nous nous sommes promenés

le 23 avril – nous avons été promener a l’hermitage de ste frêne (1) qui est très curieux, nous avons été voir mdme vallier et après diné, nous avons été a balstahl.

le 24 avril – nous avons été a liestal diner, et de la a basle

le 25 avril – nous avons été voir mr Mechel et son bel etablissement de tableaux, il a soupé avec nous, j’ai été voir aussi mdme Heitz qui m’a proposé de mener Sibille avec moi a Strasbourg

il a passé une dizaine de milles hommes par basle

j’ai rencontré mde et mr bernier que j’ai invités a venir prendre du caffé avec moi, a l’auberge, ils y sont venus

le 26 avril – nous sommes partis a 4 heures dans la voiture et avec les chevaux de mde Heitz, avec mlle sa fille pour Strasbourg, a bourg libre nous avons changés de chevaux et pris la poste, nous ne nous sommes pas arretés pour diner afin d’arriver a Strasbourg le même jour, mais malgré cela a la dernière poste on nous a prevenus que les portes de la ville se ferment a sept heures et demie, nous les trouverions fermées, il en etoit six et demie, de sorte que malgré nous, nous fumes obligés de rester a la poste de Kraft, je ne trouvai point la mon paquet dans la voiture, ce qui me fit croire qu’il etoit perdu et me mit dans un grand embarras pour ma parure du lendemain a Strasbourg, nous avons rencontré un superbe regiment de grenadiers a cheval, a brisach, ils allaient passer le rhin

le 27 avril – nous sommes partis de grand matin, a sept heures nous etions a Strasbourg, mr de Villardin est allé tout de suite chercher dans les boutiques une robe pour suppleer au defaut de mon paquet, n’en trouvant point de faites il s’adresse a une de ses connaissances nommée mlle bonnet, qui le plus obligeamment du monde m’en apporta plusieurs des siennes a choix, j’en pris une qui allait fort bien la demoiselle etant aussi grande que moi, et je la portai toute la journée, vers les neuf heures apres avoir dejeuné, et nous être un peu habillés, nous allames voir les magazins, ou nous passames la matinée, mlle bonnet eut la complaisance de nous mener partout, j’achetai une robe de tafetas, une d’indienne, des bas, j’allai tout de suite pour faire faire les dites robes mais jamais la tailleuse ne voulut y toucher parce que c’étoit dimanche, et m’en promit une pour le lendemain de bonne heure quelle feroit en s’y prenant de grand matin

pendant le diner mlle bonnet nous apporta une mousseline hochée dont mlle Heitz et moi, prirent chacune une robe, nous avons été a la comedie (2) ou mlle contat jouait ce qui y attire beaucoup de monde, je m’y suis bien amusée, mlle Heitz trouva la un officier du 8ème de Chasseurs de sa connaissance qui l’escorta et resta avec nous tout le temps du Spectacle, il etoit fort aimable

nous avons été sur la tour de la Cathédrale seulement jusqu’a la premiere platteforme d’ou la vue est bien belle nous y avons vu le thelegraphe (3) qui travailloit, et qui est posé sur la Cathédrale de la nous fumes chercher nos passeports a la municipalité, on y fut très honnête et mr levrant connu de Sibille et pour qui nous avions une lettre de mr Mechel, nous fit voir tout le beau batiment (4) de l’eveché qui fait aujourd’hui la municipalité

1) Ermitage Sainte Vérène sis à l’entrée de la gorge homonyme (Verenaschlucht), près de Rüttenen (SO). http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F7698.php

2) Le Théâtre de Strasbourg sera détruit par un incendie un mois plus tard, le 30 mai 1800 (voir illustration)

3) Pendant la Révolution française, Claude Chappe inventa et réussit à imposer à l’État français un nouveau système de transmission par sémaphores appelé Tour de Chappe. Ce premier télégraphe permettait de transmettre des messages sur une longue distance par l’intermédiaire de relais situés sur des hauteurs et distants d’une dizaine de kilomètres. Le système était optique et totalement manuel : l’invention de Chappe était composée de trois bras articulés peints en noirs placés en haut d’un mât et actionnés manuellement par un opérateur grâce à un système de poulies. L’opérateur observait les signaux émis par le relais précédent et le retransmettait au suivant. Ce système de transmission permettait de transmettre des messages de Paris à Marseille ou à Brest en seulement quelques heures, en utilisant un code pour accélérer la transmission et garantir une certaine confidentialité. En revanche, ce système avait l’inconvénient de ne pouvoir être utilisé ni la nuit ni par mauvaise visibilité. Néanmoins, en 1844, le réseau Chappe comptait 534 stations et près de 5000 km de lignes, reliant Paris à 29 villes françaises.

Source: http://www.gralon.net

4) Le Palais Rohan, l’ancien palais épiscopal de Strasbourg est aujourd’hui un musée.

Soleure, Ermitage de Sainte Vérène

Incendie du théâtre de Strasbourg le 30 mai 1800

Le palais épiscopal de Strasbourg en 1744

le 28 avril – ma robe de taffetas etant faite je rendis a Mlle bonnet la sienne, je lui donnée un schahl violet quadrillé a frange

nous avons été faire une visite a mlle bonnet et voir le mausolée du Marechal de Saxe, nous avons été a la promenade du contade ou il y avait beaucoup de beau monde

le 29 avril – nous sommes partis a neuf heures du matin de Strasbourg, en même temps que le général Souch… qui prit la route de brisach. nous nus sommes arrteés pour diner a Schelestat  on venait de passer beaucoup de troupes, après diné nous étant remis en route nous n’avons pas tardé a les retrouver, ce ne fut qu’au pas que nous parvînmes a les dépasser ce qui fut fort long. il y avait toute la une demi brigade, les soldats qui nous prenaient pour des fournisseurs nous disaient milles injures et choses désagréables, a peine les avions nous quittés qui nous trouvâmes la poste aux chevaux, de sorte que pendant le changement de chevaux, toute la troupe passa devant nous, et nous nous vîmes obligées de les traverser encore une fois , ce qui nous parut fort déplaisant, nous proposâmes a un officier sous le prétexte  de la pluye qui commençait de venir dans la voiture, l’expédient fut rès bon, car l’officier se trouva fort honnête, et dès que les soldats le virent, ils se turent et nous laissèrent passer très tranquillement. Ce jour la nous avons été jusqu’à Colmar.

le 30 avril – nous ne pumes partir de Colmar qu’a onze heures faute de chevaux, arrivés à Mulhouse nous fumes obligés d’y attendre longtemps pour la même raison, a bourg libre pareil evenement, nous y restames jusqu’à dix heures du soir, enfin il arrive deux chevaux qui nous meneront jusqu’à basle ou nous craignions de ne pas pouvoir rentrer a cause de l’heure, mais moyennant trente francs on nous ouvrit la barriere et je quittai alors Sibille qui retourna chez sa mère

nous avons retrouvé en arrivant dans la cave de la voiture mon paquet qui nous avait suivi a Strasbourg et que nous avions cru égaré

le 1er mai – Mme Heitz nous envoye inviter a diner de grand matin, nous y fumes, il y avait mr et mdme burcard a diné

après nous avons été promener ensemble au jardin du Kirschgarten, mr burcard qui nous conduisit, et qui y loge nous mena en son magazin de rubans et de lacets, il me donna deux pièces de lacets et a mr de Villardin une pièce de rubans noirs, ensuite nous sommes montés dans la maison ou nous avons pris le thé avec Sibille

revenus à l’auberge nous avons vus passer tout le parc d’artillerie qui était a huningue, il a passé le rhin et le petit basle sans s’y arreter

le 2 mai – au moment de partir nous vîmes arriver une voiture dans laquelle était mdme Settier ses enfants et mr de roll, qui venaient de Strasbourg et allaient à Soleure faisant la même route, nous avons marché ensemble, nous avons diné à Valtebourg c’est la ou j’ai fait connaissance avec mdme Settier, qui delors a été très charmante et aimable pour moi, arrivés à balstahl à sept heures du soir, nous nous y arrêtâmes nos chevaux ayant fait une journée suffisante mais mdme Settier qui avait des relais continua jusqu’à Soleure ou elle ne put arriver que dans la nuit

le 3 mai – nous avons été diner a Soleure, a peine arrivés mr babet a été assez honnête pour venir nous trouver et nous engager de la part de mde Settier a aller passer la soirée et diner le lendemain avec elle, mde Vallier vint me voir après et nous fimes la parie d’aller ensemble à fribourg le surelendemain

nous avons été chez mde Settier qui a une charmante maison hors de la ville mais tout près, nous y avons passé la soirée avec mde de roll, mde Gugger, mde altermatt, mde Vallier, mr Barthelemy employé français, nous avons été promener au Waldeck

le 4 mai – j’ai été à la grand messe, à la belle eglise, mde Vallier est venue me prendre et nous avons été diner ensemble chez mde Settier, ou étaient mr et mde de roll, mr friz de roll et mr Tschann, nous avons passé l’après midi ensemble la et vers quatre heures nous sommes partis pour nous promener au bleichberrg. j’ai été en postwagen avec mde de roll, mde Gugger, mde Settier et mde de Sarbeck. c’est les chevaux de mde Sourie qui nous ont mené, cette dame avait été en cabriolet avec mr Setttier et mde altermatt, nous les avons retrouvé au bleichberg, ainsi les autres messieurs avec qui nous avions diné, après nous être promenés dans ces campagnes qui sont charmantes et dans le bois qui les avoisine, nous sommes revenus au bleichberg de mr Wald (l’autre est au baron de roll) ou nous avons fait un fort bon gouté

après quoi nous sommes revenus en ville assez tard, j’ai été accompagner mde Settier jusque chez elle, nous avons envoyé les chevaux coucher, un d’eux boitait ce qui nous faisait trouver la journée de Soleure à fribourg trop forte pour eux, et mr de roll avait bien voulu nous proposer les siens pour le lendemain afin de nous procurer le plaisir de passer encore la soirée avec ces dames, ce que nous avions accepté.

Strasbourg vers 1800

Strasbourg vers 1800

Strasbourg vers 1800

le 5 mai – nous sommes partis à quatre heures du matin, j’ai été avec mde Vallier la petite et sa bonne dans un postvagen quelle avait pris pour sa course et ces messieurs sont partis avec les chevaux de mr de Roll, a peine avions nous fait une lieue, que la bonne se trouva mal et vomit a cause de la place de devant quelle avait, de sorte que je lui rendis celle du fond, et m’en allai dans notre voiture jusqu’à berne, nous nous sommes arretés à fraubrunn, pour changer de chevaux et déjeuner

j’ai ecrit par le cocher un mot à mlle Settier en lui envoyant la mesure et un echantillon de cheveux pour une perruque quelle voulait bien se charger de me faire faire

arrivés à berne d’assez bonne heure, j’ai été chez mde Savary et chez Sophie, mr lanther est venu nous voir et nous l’avons invité à diner, mr Savary que nous n’avions pas trouvé le matin est venu nous voir pendant le diné

comme on nous avait donné une chambre que le general moncei (1) venait de quitter, le gal monchoisi (2) qui l’y croyait encore vint l’y chercher, voyant qu’il s’était trompé, il s’arrête un moment, cause avec mdme Vallier qu’il connaissait fut très honnête et s’en alla

Mr de Villardin m’a donné une petite chaine d’or fort jolie et une tasse de porcelaine qu’il avait acheté à la foire de berne, après diné mde aftelmann nous a engagé en attendant les chevaux a aller dans sa chambre ce que nous avons fait, elle y a été très aimable

arrivés à la porte de la ville je fis mes adieux à mde Vallier, dit à jacques blanc de conduire la voiture jusqu’à la porte des etangs, et je montai la ville à pied avec guillaume et Mr de Villardin, je rencontrai mr ett mde bugnon, mde forestier et josephine, de qui j’ai reçus les complimens, étant arrivés à la porte avant la voiture, nous avons continué jusqu’à jevisy à pied, nous avons rencontré au cimetière de l’hôpital mdes de berlens et boccard avec ninette, mr boccard, albert fegely et ensuite consatantin, ils sont venus avec nous jusque vers la porte, ils arrivaient de gevisy ou on nous avait attendu toute la journée

nous sommes enfin arrivés à gevisy ou j’ai trouvé mes parens en bonne santé, j’ai eu un plaisir extrême a les revoir, j’ai donné à julie un eventail et à minette un peigne doré, j’ai trouvé le major etabli à gevisy

le 6 mai – j’ai été chez mdme de Berlens le matin ainsi que chez mes tantes fegely, Vicomtesse et Diesbach, à mon retour à gevisy j’ai trouvé sur ma table dans ma chambre le charmant necessaire que mr de berlens m’avait envoyé pendant que j’étais à fribourg qui m’a causé autant de surprise que de plaisir, après diné nanette est venue avec constantin et plus tard, mr de berlens est venu avec ninette, je lui ai fait mes remerciemens et j’ai donné un demi louis à bertschi qui avait été le porteur du necesssaire

nanette est partie avec mr de berlens dans son Wicki avec ninette

Charles était venu me voir de bon matin et il est venu en ville et revenu à gevisy avec moi, mimi est parie pour engi avec son père, j’ai donné une tasse de porcelaine au major

le 7 mai – j’ai été chez mes tantes Diebach et fegely, j’ai rencontré mimi qui arrivait de cugi, elle est venue avec moi à la maison de papa ou j’avais affaire

près diné mde de berlens et ma tante Diesbach sont venues nous avons fait un lotto et pris du thé ensembles

marianne guyot est venue et je lui ai dit de venir le lendemain pour s’établir avec ses effets

le 8 mai – marianne guyot est entrée à mon service

le 9 mai – j’ai été diner chez mdme de Berlens avec Walpourg son mari, belon et minette

j’ai été le matin à la maison de mr de Villardin avec mde Boccard et minette, j’y ai trouvé beaucoup de fleurs que mde boccard y avait fait apporter et un oranger en fleur et deux balons d’or en fleur et en pot, nous avons été voir toute la maison, dela j’ai été voir mde Gottrau, après mlle fegely et mde la brigadière à diné

mr de berlens m’a donné un très joli ridicule (3) et mr de Villardin un voile imitant la blonde noire, une robe de toile de jouey (4), deux chapeaux et un bonnet, j’ai donné aux gens de mr de Villardin un mouchoir et un demi louis à chacun

le 10 mai – mr de berlens, sa mère et ses sœurs ont dinés ici ainsi que madelaine, Gottrau de Nierlet, après diné on a été au verger, flore le petit cheval de ninette sur lequel elle était venue, minette y a monté longtems et s’en est fort amusé ainsi que tout le monde qui était la, mais en s’en allant à l’écurie il a donné un coup de pied au visage à libeck qui nous inquiète beaucoup, nous craignions pour son œil, qui heureusement n’eut point de mal, on le pansa ici, ensuite on le conduisit en cabriolet à la ville, un moment après nanette et fanchette sont venues

le 11 mai – nous avons été déjeuner avec mde de berlens, mr de berlens, ninette, tante Diesbach, Charles et mes sœurs et constantin

1) Général Bon Adrien Jeannot de Moncey

2) Général Louis Antoine Choin de Montgay, baron de Montchoisy

3) Ridicule, sac que les femmes portent à la main pour y mettre leur mouchoir, leur bourse, etc. Ridicule, en ce sens, est une corruption de réticule. On le nommait précédemment sac à ouvrage (Dictionnaire National 1855)

4) Toiles de Jouy, toiles (coton) peintes originaires de la manufacture de Jouy-en-Joras (près de Versailles) (Dictionnaire National 1855)

Berne

La manufacture de Jouy

Dès leur retour de Strasbourg Elisabeth d’Affry et Nicolas Castella de Villardin n’habitent plus la ville de Fribourg. Ils s’installent à Montrechu (Monterschu près de Cormondes). Le château de Monterschu appartient à la famille Fégely, famille de la mère de Nicolas Castella de Villardin, Marie Madeleine de Fégely de Vivy.

Les inscriptions dans le journal d’Elisabeth se limitent pour l’essentiel à des invitations et des déplacements dans la campagne fribourgeoise (Wallenried, Belfaux, Nierlet, Givisiez, Seedorf etc) sans grand intérêt. Nous nous limitons aux inscriptions qui relatent d’autres événements. Ces inscriptions s’arrêtent au 30 juin.

le 5 mai – j’ai été avec mr de Villardin diner chez mde de berlens avec mr pierrou Castella et larmintran, c’est le jour ou ces messieurs faisait leurs comptes

j’ai été le matin chez papa faire ma malle, et l’après diné chez mr de Villardin ranger mes affaires avec Marianne guyot, nous avons été faire quelques visites à la marquise, mde odet

le 25 mai – j’ai été à Montrechu avec ninette, mr de berlens et mr de Villardin, ninette était à cheval sur flore et mr de berlens nous conduisait dans son phaëton (1)

papa, minette et guillaume sont venus à Valleried diner et nous sommes revenus apres ensemble à gevisy, ma tante Diesbach et mr de Mezieres sont aussi venus en passant, ils avaient diné à Courgevaux

nous avons envoyé un louis aux paysans de Montrechu qui voulait tirer pour mon arrivée afin qu’il n’en fassent rien, ce moyen a aussi bien reussi qu’à gevisy le 21 avril

le 1er juin – jour de Pentcôste, nous sommes partis par une pluie battante en cabriolet à la grand messe à Cormonde, au retour le cabriolet a cassé en consequence nous avons été obligés de faire le reste du chemin à pied par un chemin et un tems affreux

l’après diné nous sommes allés à gevisy en passant par Valleried, ou nous nous sommes arretés un moment

le 3 juin- papa, maman, mes soeurs, guillaume, le vicaire, le major, mr de Villardin et moi, avons été tous ensemble en pelerinage à tour (2), pour satisfaire au vœu que maman mes sœurs et moi avions fait pour papa, au 2 mars (3), d’aller aux hermites, l’image miraculeuse n’y etant plus, maman a fait demander a l’evèque la permission de changer le lieu du voyage, ce qu’il a accordé, en consequence nous avons été prier et entendre la messe que le vicaire nous a dite a tour, nous avons dejeuné chez le curé et en repassant a montagni, papa, mr de Villardin et moi avons été faire visite a mr Colin georgeou et charlon castella

en revenant a gevisy en char a banc, il est survenu une forte pluye qui nous a bien mouillés, il y avait si peu d’apparence que nous n’avions point de parapluye, nous n’avons diné qu’a quatre heures en arrivant a gevisy

le 11 juin – nous sommes partis de montrechut charles, mimi, constantin, guillaume et minette avec nous pour gevisy ou nous avons diné tous, après diné nous sommes revenus à la ville, ou j’ai logé pour la première fois chez mr de Villardin

le 12 juin – fête dieu, grande procession ou les grenadiers ont figurés en grande parade, après l’avoir vue passer de chez mimi j’ai été a la grand messe avec elle, rosalie a fort bien chanté, guillaume et mr Louis sont venus diner ici, guillaume y a couché, mde de Berlens a envoyé chercher mr Sudens pour mr Colin qui était fort souffrant

1) Phaéton: voiture à quatre roues haute et légère (voir illustration)

2) Notre Dame de Tours: lieu de pèlerinage près de Cousset

3) début mars Louis d’Affry était malade

Phaéton

Notre Dame de Tours

Epilogue

Au mois d’août 1800 Elisabeth d’Affry et son époux Nicolas, comte de Castella Villardin se rendent aux eaux de Plombières. C’est une station thermale chic des Vosges. Anciens thermes romains, les bains de Plombières accueillent au fil des siècles d’illustres curistes comme Montaigne, Louis XV, Voltaire, Beaumarchais, Napoléon Bonaparte, Joséphine de Beauharnais, Lamartine, Berlioz et Goya.

C’est dans ce décor huppé que Nicolas de Castella de Villardin meurt subitement le 30 août 1800 à l’age de 35 ans.

Dans son journal Elisabeth d’Affry ne mentionne jamais les sentiments qu’elle éprouve pour son mari. En parlant de lui, elle écrit toujours Mr de Villardin et chose qui frappe, c’est le seul nom qu’elle orthographie toujours avec une majuscule. Il s’agissait donc certainement d’un mariage de raison.

Elisabeth d’Affry ne se remariera pas. Veuve aisée et sans enfants elle sera l’une des figures incontournables de la vie mondaine de Fribourg et tiendra salon. Les salons sont une coutume importée de France. Ces assemblées se tiennent à un rythme hebdomadaire régulier. C’est la maîtresse de maison qui invite sa famille et ses connaissances. A Fribourg les salons sont surtout le fait de la famille d’Affry. L’épouse de Louis d’Affry, Marie-Anne-Consantine de Diesbach-Steinbrugg, réunit sa société tous les lundis et vendredis soir. Ceux de Elisabeth ont lieu les mercredis et ceux de Nanette, Marie de Castella de Berlens, l’épouse de Guillaume d’Affry, les mardis. Ces salons prennent toute leur importance en 1803 et 1809, lorsque Louis d’Affry est Landamman de Suisse et que Fribourg accueille les participants à la Diète ainsi que les représentants diplomatiques étrangers.

Autre fait marquant. En 1809 Elisabeth, catholique pratiquante, est reçue dans la loge maçonnique de Sainte Caroline à Berne, le même jour que l’épouse de l’ambassadeur de France en Suisse, Auguste de Talleyrand.

Elisabeth meurt en 1831 à l’age de 56 ans.

Quand au patronyme d’Affry, il s’éteint vers 1850 avec les mariages des sœurs Adèle et Cécile d’Affry. Adèle, l’artiste Marcello, s’unit à une famille italienne Colonna et Cécile à une famille autrichienne Ottenfels.

Marcello (Adèle d’Affry, duchesse Castiglione Colonna): http://www.fr.ch/mahf/fr/pub/musee_art_et_histoire/collection/i77625_1.htm

Sources:

Georges Andrey et Alain-Jacques Czouz-Tornare, Louis d’Affry, 1743-1810, Premier Landamman de la Suisse

Francis Python, Pouvoirs et société à Fribourg sous la Méditation (1803-1814)

Remerciements:

Le Blog du Bourg remercie Monsieur Alain Hunziker, brocanteur et propriétaire du Journal de Elisabeth d’Affy, Monsieur Alain-Jacques Tornare, historien et Monsieur J.-Daniel Dessonnaz, archiviste de la Ville de Fribourg.

Plombières les bains

Elisabeth d’Affry

Une réponse to “Souvenirs 1800”

  1. DAFFLON Alexandre said

    Bonjour, je découvre aujourd’hui votre site et particulièrement l’édition du journal de Melle d’Affry pour les 6 premiers mois de l’année 1800. Il se trouve que les Archives de l’Etat ont acquis le document original l’an dernier. Puis-je savoir quand vous avez eu en mains ce document ? Et savez-vous si d’autres journaux d’Elisabeth d’Affry existent quelque part ? Merci d’avance de votre réponse.
    Alexandre Dafflon, Archiviste cantonal, Fribourg

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